L’organologie, science des instruments de musique
Comme son nom l’indique (en grec, organon signifie instrument), l’organologie est la science des instruments de musique. Elle est née en tant que discipline au XVIIè siècle. Utile à la musicologie (science de la musique classique occidentale), elle l’est aussi à l’ethnomusicologie. On parlera alors d’ethno-organologie.
Elle est à l’instrument ce que la musicologie est à la musique : son but est d’étudier l’instrument de musique. Celui-ci étant un objet tangible et dénommé, toutes les approches possibles doivent être combinées pour parvenir à le comprendre dans sa structure, son histoire, son utilisation musicale et extra-musicale : étude des techniques de fabrication, des techniques de jeu, fonctionnement acoustique, diffusion, contexte de jeu, terminologie et étymologie, sens et symbolique, etc.
La classification n’est qu’un volet de cette science. Elle vise à hiérarchiser et systématiser l’ensemble des instruments de musique à l’intérieur d’une culture donnée (classifications vernaculaires) ou, au-delà des limites culturelles, elle tente de prendre en compte tous les instruments de musique et objets sonores dans le monde dans une démarche scientifique et comparative (la classification de Sachs et Hornbostel en est l’un des meilleurs exemples).
Histoire d’une discipline
Les expositions universelles à la fin du XIXe siècle, font découvrir aux visiteurs divers produits «exotiques» à travers les pavillons des Colonies ; les expéditions de voyageurs qui s’accompagnent de collectes d’objets ethnographiques dévoilent elles aussi un univers lointain jusqu’alors méconnu. On peut vraiment dire que l’enrichissement des collections des musées d’instrument de musique en l’occurrence, se trouve à l’origine de l’évolution du regard porté par l’Occidental sur cet objet particulier.
En 1893 en effet, Mahillon, conservateur du musée instrumental du conservatoire royal de musique de Bruxelles, construit sur le modèle de la classification traditionnelle indienne un système quadripartite reposant sur une question fondamentale: "quelle est la matière vibrante qui produit le son ?". Si cet organologue fut le premier à proposer un système permettant de classer ces instruments «exotiques» pour lesquels la classification occidentale (bois, cuivre, cordes...) convenait fort mal, c’est à deux allemands, Curt Sachs et Erich von Hornbostel que l’on doit la taxinomie utilisée de nos jours et qui s’applique autant aux instruments classiques occidentaux qu’aux "autres".
Il est important de dire que cette taxinomie, dite classification Sachs/Hornbostel, est particulièrement adaptée au monde des musées pour lequel elle a été élaborée à l’origine. Essentiellement morphologique, elle considère essentiellement la nature sonore des matériaux et laisse de côtés toutes données culturelles et musicales (ces dernières n’étant d’ailleurs pas toujours connues).
Elaborée dans le premier quart du 20è siècle, cette classification a été suivie d’autres tentatives qui ont rencontré un succès moindre. André Schaeffner (1895-1980), qui rejoint dans les années 1920 l’équipe du musée du Trocadéro où il est chargé d’organiser le département de musicologie comparée (qui deviendra le département d’ethnomusicologie du Musée de l’Homme), propose une classification bipartite.
D’un côté, on a :
(I) les instruments à corps solide vibrant subdivisés en :
(Ia) non susceptibles de tension (ce sont les idiophones),
(Ib) flexibles ou susceptibles de tension (cordophones et membranophones).
De l’autre côté, on a :
(II) les instruments à air vibrant (aérophones) subdivisés en :
(IIa) air ambiant,
(IIb) cavité libre,
(IIc) instruments dits à vent.
Dans le monde anglo-saxon également, de nombreuses tentatives, notamment à l’aide de l’ordinateur qui gère le plus grand nombre de paramètres possibles, seront tentées mais pas adoptées massivement par la communauté scientifique. L'exemple de l'organogramme de Mantle Hood semble peut-être le plus intéressant car il tient compte des contextes de jeu.